Même à la Fête des mères, l'amour est un plat qui se mange froid et la passion un dessert qui se déguste chaud. La 11e finale de championnat de l'AS Clermont Auvergne a enfin souri à un peuple auvergnat peu avare de fidélité, et qui aura vécu 800 minutes de désespoirs. René Fontes, le président asémiste évoquait ce soutien sans faille de la « Jaune Army », et son souhait de récompenser les amoureux transits par le plus beau des trophées s'est réalisé ! Après 3 tentatives de suite, la capitale des volcans peut « érupter » de bonheur. Le titre tant attendu sera place de Jaude au petit matin et au pied du Puy-de-Dôme pour 365 jours…ou presque. Dans un Stade de France rempli comme un œuf de jaune, rouge et bleu, les Auvergnats avaient décidé de prendre le jeu à leur compte dès l'entame de match. Quitte à avoir gagné le toss et à choisir le coup d'envoi, autant garder la balle au chaud. A ce petit jeu ce sont les plus habitués au froid qui vont se mettre l'ovale au plus près du cœur…
L'anecdote circulait sous le manteau mais il semblait bien que ce succès des Jaunards était déjà scénarisé. Par qui ? Goscinny et Uderzo les parents d'Asterix. Certains esprits taquins et férus de bande dessinée si chère à Mourad Boudjellal adversaire malheureux de l'ASM à Saint-Etienne en demi-finale, avaient donc noté que le 11e tome de l'irréductible gaulois et de son enveloppé compagnon s'intitulait…le Bouclier Arverne ! On se rassure avec les symboles comme on peut mais c'est aussi à la 11e minute que l'ASM ouvre le score par une pénalité de Morgan Parra après avoir passé tout ce temps dans le camp de Catalans qui verront au fil de la rencontre la horde jaune et bleu allègrement camper sur leur terrain juste avant l'été et des vacances bien méritées.
L'ASM ne venait pas en touriste
Dès la 3e minute Perpignan avait pu se rendre compte que l'ASM ne venait pas en touriste dans un stade qu'elle ne connaît que trop, en échouant à quelques mètres de la ligne d'en-but. Un premier avertissement sans frais qui sera le seul temps fort non concrétisé par des Clermontois nous ayant habitué à les galvauder. Même si Parra a raté sa mise en jambe (5e), ses coéquipiers prenne le match à bras le corps et décident d'aller se le gagner ce Brennus au nom si gaulois. Porical rate lui aussi une minute après ; il en ratera d'ailleurs deux autres en première mi-temps dont une face aux poteaux juste avant la pause. Et de 3-0 à la 11e minute on passe à 10-0 à la 13e minute grâce à une nouvelle incursion des vice-champions de France dans la partie de leur bourreau de l'an passé. On perce, on se regroupe au sol et Parra sort la balle rapidement, fait mine d'envoyer au large mais trouve Nalaga à l'intérieur qui, en force, au ras du regroupement pose la gonfle en but face aux supporters clermontois.
L'intensité des plaquages et le jeu au pied incessant font de la rencontre un match âpre et donc du titre de champion une ligne chèrement burinée sur la plaque plus que centenaire du « bout de bois ». Perpignan semble subir le jeu de l'ASM où James dégage rapidement la balle dans le camp adversaire quand Porical ne lui rend pas la pareille. A la 18e minute, l'Usap perd une touche et Clermont la récupère donc mais commet une faute sanctionnée par la première des six mêlées de la 1ere période. Le pack Sang et Or fait des misères à son vis-à-vis et obtient une pénalité face aux poteaux : 3-10, l'USAP retrouve des couleurs. Son adversaire reste fidèle à sa ligne de conduite : vite sortir la balle pour James qui balance une quille par-dessus une défense catalane énorme sur ses plaquages.
Cudmore et Rougerie groggys
A la 25e , une nouvelle faute au sol de Clermont face aux poteaux à 32 mètres permet à Porical de ramener son équipe à 4 points : 6-10. Mais Parra se fait fort d'éteindre tout espoir et, trois minutes après, remet Clermont dans le bon sens : 6-13. La fin de la première période continue sur le rythme intense imposé par des Clermontois qui n'ont pas envie que cette énième finale ne leur échappe. A la demi-heure de jeu, Cudmore puis Rougerie goutent aux épaules et genoux catalans et en ressortent quelques peu groggys mais pas assez pour céder leur place dans une finale qu'une nouvelle fois l'ASM semble bien tenir en mains.
Juste avant la mi-temps Porical a l'occasion de mettre les Catalans à 9-13. La pénalité est facile : 35 mètres face aux poteaux avec son public en ligne de mire mais le buteur rate sa cible et laisse l'ASM aller se restaurer sur le score de 6-13. Les publics en profitent pour s'adonner à leur passion favorite avec tout leur chœur. Côté ASM on saute dans les travées ; côté Catalan ont fait résonner des « USAP » au ton grave et lourd comme un orage de bord de mer.
La seconde mi-temps ne donne rien pendant plus de 20 minutes avec un Brock James qui rate un drop à la 53e et l'arrière adverse qui vendange –de nouveau- une occasion de revenir au score. Puisque l'USAP ne semble pas en mesure de vouloir ramener le bouclier au Castillet, Parra remet une couche et trois points à la 62e minute : 6-16 ! Les drapeaux jaunes et bleus s'agitent et Nalaga glisse alors que Clermont envoyait de nouveau ses irréductibles au combat. Et comme à la première minute de jeu, à la 64e, les esprits s'échauffent un peu et monsieur Berdos les calme avec autorité.
Jean-Marc Lhermet est en larmes
L'USAP se fait trop souvent bousculer et commet trop de fautes pour véritablement inquiéter des Clermontois qui sentent le fumet de la victoire chatouiller leurs narines. Parra a bien l'occasion de mettre la tête des usapistes dans le seau à la 67e minute mais son coup de pied de 45 mètres est trop juste (6-16). La 1ere victoire asémiste et 9e défaite perpignanaise en finale se profile à l'horizon. D'autant plus qu'une minute après une touche à 5 mètres de la ligne catalane, avec lancer catalan, voit le maul des Auvergnats enfoncer les Catalans et les obliger à relancer au pied. Floch se saisit du ballon et envoie un drop assassin entre les perches du champion de France : 6-19 ; Clermont peut commencer envisager sérieusement d'aller faire la visite des bougnats parisiens un à un pour les heureux spectateurs dyonisiens, et faire de Clermont une ville exaltée pour ceux restés au pays !
Nicolas Durand fait ses adieux pour le Racing Métro 92 ; Franck Azema aussi mais, lui, défendra de nouveau le Brennus. Sur le bord de touche, Jean-Marc Lhermet grand artisan dans l'ombre de la construction de l'ASM nouveau est en larmes de joies…il y avait cent ans que celles-ci n'avaient pas inondé l'Auvergne. Il reste à mettre cette eau salée mais joyeuse en bouteilles, faire en sorte que la source ne tarisse pas et permettre aux enfants, petits-enfants et autres petits gaulois d'écouter cette légende des siècles gravée sur le bouclier de Brennus. Le nom de l'ASM y est désormais inscrit. Dans le bronze à défaut de l'être dans le marbre, certes, mais le bronze est cet alliage dont on fait les statues…
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