- D'une manière générale, qu'avez-vous pensé du match face aux Tonga ?
Le sentiment premier est la satisfaction car il fallait renouer avec la victoire et c'est chose faite. Après que ce soit face aux Tonga ou n'importe qui d'autre, ce n'est pas la question, la question était de gagner et la victoire est là. Maintenant il y a eu du bon, du moins bon, mais c'est fait. Ils sont dans la logique affichée depuis le début des tests après une belle prestation face aux Blacks malgré la défaite. Ils prennent les matches les uns après les autres, franchissent les obstacles au fur et à mesure, et ils doivent continuer à le faire face à l'Afrique du Sud.
- Pour être plus précis, qu'est-ce qui vous a le plus intéressé ?
J'ai beaucoup aimé l'état d'esprit en général. Il y a eu de l'ambition, des intentions, une bonne gestion du jeu par la charnière avec Rémi Talès qui s'installe peu à peu. Ensuite, j'ai apprécié la confirmation des hommes en fort en tête desquels Maxime Médard et Brice Dulin qui m'ont fait forte impression. Je dirai également un mot sur Gaël Fickou, qui a parfaitement signé son entrée, et qui promet d'être, rapidement et sur le long terme, un joueur important de cette équipe de France.
- Des déceptions ?
Oui deux, concernant deux joueurs. D'abord le carton rouge de Yoann Maestri qui même s'il est provoqué fait tâche. Pour le joueur cela aurait pu le priver d'un superbe test face aux Sud-Africains, et pour nous, parce que face à cette équipe nous en aurions bien eu besoin. Cela se termine bien puisqu'il est blanchi, mais ce n'est pas à reproduire. Ensuite c'est la blessure de Fufu (Ndlr : Fulgence Ouedraogo).
- Place à l'Afrique du Sud. D'une manière générale, que vous inspirent les Boks ?
Dans la hiérarchie mondiale, ils viennent juste derrière les Blacks. Après à quel niveau ? Loin des Blacks c'est sûr, mais très haut tout de même. C'est un autre jeu, un autre style, basé sur la puissance, la destruction, mais pas seulement. Ils ont en effet, pour récompenser ce gros travail de sape, de superbes finisseurs, que ce soit au pied avec Steyn ou en bout de ligne avec Habana. C'est une équipe qui se connait bien, qui sait concrétiser ses temps forts. C'est un très gros morceau pour résumer, et il faudra être au top.
- La série de cette équipe est impressionnante, car elle n'a perdu que deux de ses 14 derniers matches toutes compétitions confondues (face aux Blacks à chaque fois durant le dernier Rugby Championship), pire, elle ne s'est plus inclinée en test matches depuis le 20 novembre 2010 et un revers face à l'Ecosse 17-21. Qu'elles sont les clés d'un match face aux Boks ?
Oui cela confirme ce que je viens de dire, c'est du lourd, du très lourd. Mais on les connait, on sait ce qu'ils aiment faire, et c'est là qu'il faut savoir leur poser des problèmes. Il faut faire ce que les Blacks font à merveille ou ce que nous étions parvenus à faire en 2009 lors de la dernière victoire française face à eux (Ndlr : 20-13 à Toulouse), à savoir plier mais ne pas rompre en défense, encaisser leur puissance, et être capables de les bouger, de les forcer à se déplacer. Ainsi cette équipe s'étiole quelque peu et les coups sont jouables. C'est en tout cas le test parfait pour les Français, car s'ils nourrissent des regrets au sortir de leur défaite contre la Nouvelle Zélande, c'est l'occasion rêvée de montrer qu'ils s'en sont servis pour rebondir.
- Quels joueurs selon vous peuvent avoir un rôle prépondérant à jouer samedi ?
Il faut des joueurs capables d'amortir leur puissance, de rivaliser dans la force pure, des garçons souples, capables donc de tenir sur le défi mais également de se déplacer et de poser des problèmes dans ce registre. Maintenant, le groupe est là, il n'y a pas eu de changements si ce n'est pour remplacer les joueurs blessés ou indisponibles, il faut donc capitaliser là-dessus. Les joueurs qui débuteront, c'est du domaine de l'anecdote.
- D'un point de vue plus personnel, vous n'avez disputé qu'un seul match face à l'Afrique du Sud, et quel match ! (Demi-finale de la coupe du Monde 1995, perdu 19-15 sous des trombes d'eau). Quel souvenir gardez-vous de ce match, de ce jour, de cette défaite ?
En ce qui concerne le match en lui-même, au-delà de la frustration de la défaite, je me souviens que nous avions l'équipe pour battre ces Boks. Devant nous avions des joueurs capables de répondre dans le combat à l'image des Benazzi, Merle ou de notre première ligne très dense. Mais derrière, nous avions une ligne de trois-quarts très physique également avec Sadourny, Saint-André, Sella, Lacroix… Nous ne craignions pas cette équipe, car l'alchimie entre la puissance et la vitesse était excellente.
Après nous n'avons pas perdu sportivement, nous avons perdu politiquement. Il y a forcément la frustration d'avoir perdu une demi-finale de Coupe du Monde sur le moment, mais avec le recul, tu vois que c'est anecdotique, car cela a permis le renouveau d'un pays, d'un peuple. Il y avait des enjeux bien supérieurs à ceux d'un match de rugby, et cette déception pourrait se transformer en satisfaction d'avoir vu cela se réaliser.
Retrouvez la fiche d'Emile Ntamack, parrain de la LNR, ici.